vendredi 5 décembre 2008

Le quotidien et le livre

Le connu, le familier ne peut exister sans l'inconnu et l'étranger. C'est grâce à la rencontre de l'étranger que le familier prend sens. Il y a comme des rayons, des connexions entre le familier, le quotidien privé, le chez-soi et l'étranger qui peut prendre la forme du quotidien public. On peut parfois retrouver du familier dans l'étranger, des endroits que l'on connaît bien mais qui diffèrent du quotidien privé qu'est le chez-soi. Le quotidien englobe donc ces deux notions de quotidien, privé et public. L'un n'existe pas sans l'autre, c'est ce lien qui crée le quotidien.


Le livre circule d'un espace à un autre. Il passe du quotidien public (bibliothèque, librairie) au quotidien privé d'un individu, son "chez-soi" et avant même d'être dans ce quotidien privé, il se dissimule dans la frontière, dans un de ces rayons, une de ces connexions entre ces deux quotidiens, c'est-à-dire la rue, les transports, des lieux familiers mais qui ne sont pas un "chez-soi".
S'il est emprunté, il retournera dans un quotidien public avant que quelqu'un d'autre ne le fasse pénétrer dans son "chez-soi".
S'il est acheté, la personne pourra le faire partagé à d'autres, il "visitera" donc d'autres lieux familiers et propre à une autre personne.
Il restera peut-être dans un recoin du "chez-soi" et en fera partie intégrante.
Il pourra également être laissé dans un transport, à disposition d'autres lecteurs, retournera donc dans un quotidien public mais en circulation.
Quel rapport y a-t-il entre le livre et le quotidien ?

Le livre est présent partout autour de nous, on ne le voit pas toujours, on y fait pas attention mais il est là ; montré ou caché, il se présente fier dans une vitrine, fait étalage dans une bibliothèque, se dissimule dans un sac, nous entoure dans notre lieu de vie.
Il est un outil d'instruction et de plaisir, les deux se mêlant parfois.
Il ne prend vie que lorsqu'on le manipule, lorsqu'on l'ouvre et le lit. C'est pourquoi il doit avoir toute notre attention.


Extrait

« De nos jours, la plupart des objets culturels sont intégrés dans une approche multitâche. Autrement dit, on peut écouter de la musique en lavant la vaisselle, visionner un film en bavardant avec son voisin ou lire huit sites Web en simultanée. Le livre, en revanche, demeure l’un des seuls objets culturels qui exigent de tout arrêter. Pour exister, il nécessite une attention exclusive. Impossible de lire un bouquin en pensant à autre chose. Dans un monde multitâche, consacrer tout son temps à une seule activité revient à perdre son temps - ce qui explique sans doute en partie pourquoi on lit moins de livres qu’auparavant. L’intérêt du livre se trouve pourtant là : il exige certes plus d’effort, mais il dilate les heures. Le livre est, en somme, une machine à courber le temps. »
Nicolas Dickner